Hélène Pierucci, sellière-maroquinière, partage ses conseils pour une récoNversion réussie
Un jour de grève et de pluie du mois de décembre, je suis allée à Suresnes dans la galerie La Verrière. J'avais très envie de rencontrer tous ces artisans d'art installés depuis quelques mois dans une dizaine d'ateliers, grâce à l'aide de la mairie soucieuse de valoriser le patrimoine culturel local. Un bel éventail du savoir-faire français : restaurateurs d'art, céramiste, bijoutières, maroquinière... C'est ici que j'ai rencontré Hélène Pierucci, devenue sellière-maroquinière en 2012 après une première vie professionnelle.
helene, Quand êtes-vous devenue maroquinière ?
Il y a environ 8 ans de manière bien claire (2012). J'avais devant moi près de 20 de vie professionnelle et je ne me voyais pas faire le même job pendant tout ce temps. A l'époque je ne connaissais pas la différence entre sellier maroquinier et maroquinier. La différence entre les deux est le type de finition, à bords francs chez les selliers maroquiniers, nécessitant une couture réalisée à la main et à bords “rembordés” par la matière chez les maroquiniers.
Comment vous-êtes vous formée a la maroquinerie ?
J’ai commencé à me former seule avec internet puis j’ai complété par un CAP de maroquinerie au Greta du design et des métiers d’art à Paris. J’ai financé moi-même la formation et cela m’a coûté 7 500 euros. J’ai appris les bases techniques théoriques et pratiques indispensables. Mais ce que j’ai appris d’essentiel, c’est auprès de mes confrères. C’est la clé !
Etes-vous formée également à être chef d’ENTREPRISE ?
Je gère aujourd'hui une entreprise et cela va bien au delà de l'exercice de la maroquinerie. Je gère moi-même la comptabilité, la communication, je gère tous les dossiers financiers : bancaires, budgets prévisionnels, calculs des coûts de revient etc... Je m'occupe des dossiers fiscaux, légaux et juridiques, ce qui est très important pour limiter les charges en debut d'activité. Pour toute cette partie de ma vie professionnelle, j'ai la chance d'être titulaire d'un master en contrôle de gestion et de 25 ans d'expérience professionnelle en tant que directrice financière et dirigeante de société. Je mentionne cette formation car elle est vraiment importante pour devenir artisan indépendant.
Pouvez-vous nous décrire les grandes étapes de votre parcours ?
J'ai fait des stages, des stages et puis enfin le grand saut ! Mon quotidien est beaucoup plus dense aujourd'hui qu'au debut surtout en matière de production. Je produis 12 heures par jour, six jours sur sept presque toute l'année.
Je vous décris ma journée type : 1h d'administratif et de communication, 1h de commercial et le reste du temps, je le consacre à la production. Je dédie également une demi-journée par semaine au prototypage et à la création.
Qui sont vos clients ?
75% de mon chiffre d’affaires est réalisé avec des professionnels et 25% avec des particuliers (de profil CSP+ avec positionnement haut de gamme)
Vivez-vous de votre métier ?
Il se dit qu'il faut cinq ans pour avoir une idée de viabilité ! Mon entreprise a des comptes équilibrés et une trésorerie saine. Mon choix a été l'investissement durant les premières années au détriment d'une rémunération modeste. Sans ces investissements, il m'aurait été impossible de croître et de répondre aux demandes de sous-traitance.
Mon salaire actuel est de 750 euros bruts par mois ! Et je travaille 60 heures par semaine ! Je suis à une étape palier dans la vie de mon entreprise et je cette année je pourrai gagner un SMIC !
Mais il ne faut surtout pas rêver !! Il faut pouvoir tenir financièrement cinq ans, je pense. C’est le temps de créer une clientèle et c'est assez long. Les deux ans de chômage ne sont pas suffisants !
Un conseil pour les personnes qui veulent se réorienter vers la maroquinerie ?
Il faut être lucide. Etre maroquinier c'est être artisan ouvrier ! Il faut aimer faire, refaire et refaire la même chose ! Attention aux ambitieux créateurs, car la création nécessite beaucoup de moyens (stock, matériel, matériaux, développement etc...)
quelle est votre motivation quotidienne ?
Il est incontestable que ce métier est assez difficile, physiquement et financièrement ! Mais je savoure mon quotidien car ma carrière est derrière moi et je n'ai plus de gros besoins financiers. Je me sens libre et aider les autres à fabriquer comble mes ambitions créatives.
Pour en savoir plus :
Site web : po-maroquinerie.fr
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